Article 1C. L’influence du raisonnement logique sur mon psychisme et mon comportement.


Le premier article de cette troisième partie sera une réflexion sur le cerveau et la conscience.



          L’évolution du cerveau ; le développement du néocortex (nouvelle écorce cérébrale) chez l’Homo sapiens.

          Le cerveau humain est un organe relativement petit par rapport à notre corps, localisé dans le crâne, il est protégé par des membranes appelées méninges. Le cerveau baigne dans un liquide épais qui a un rôle protecteur et nourricier.
          Le cerveau humain est fortement plissé et ramassé sur lui-même, ce qui a pour effet de lui donner une masse considérable, de plus il est subdivisé en deux hémisphères symétriques. Il n’y a aucune ressemblance anatomique d’un cerveau humain à un autre, aucun cerveau humain ne se ressemble visuellement, mais toutefois nous pouvons distinguer, placé dans diverses positions, les aires principales comme : l’aire du langage dans le cortex frontal inférieur, l’aire de la motricité au sommet du lobe pariétal, le cortex sensitif à l’arrière du lobe pariétal, l’aire visuelle à l’arrière du lobe occipital, l’aire auditive dans la partie supérieure du lobe temporal.
          Chez le fœtus humain le cerveau est lisse, il acquiert ses plis au cours du développement de l’écorce cérébrale (cortex). Ce développement établi la différence essentielle entre l’Homo sapiens et les anthropoïdes.
          Le développement du cerveau suit un plan identique à celui de l’évolution des espèces ; il se compose de trois parties : le plus primitif, le cerveau reptilien, à l’intérieur le cerveau limbique médian, siège des sensations et le dernier, le néocortex qui est le plus développé chez l’être humain. Nous pouvons dire que par le développement exceptionnel de son néocortex le cerveau humain est un des outils le plus perfectionné de la pensée abstraite.

          L’incroyable enchevêtrement des circuits de la pensée.

          Le cerveau est constitué d’environ 100 milliards de cellules nerveuses de diverses formes (les neurones) et le système nerveux humain complet contient environ 300 milliards de neurones. Chaque neurone comprend un corps cellulaire le noyau contenant divers organites. Le corps cellulaire est prolongé par un long filament tubulaire (l’axone) qui a pour fonction de transmettre l’influx nerveux aux autres neurones ou aux fibres musculaires, le contact étant établi chimiquement (par les neuromédiateurs) ou, plus rarement, électriquement, par l’intermédiaire d’une petite fente appelée « synapse » ; la synapse assurant la jonction entre les neurones. Chaque neurone possède environ 10 000 synapses qui peuvent transmettre autant d’informations venant des sens. Nous pouvons alors imaginer les possibilités infinies que possède le cerveau humain, soit 100 milliards de neurones multipliés par 10 000 possibilités de voies pour l’influx nerveux ; ce qui veut dire, que nous avons les moyens de disposer de 1 million de milliards de combinaisons pour structurer notre pensée, pourtant nous n’utilisons dans notre vie qu’une infime partie de nos capacités cérébrales.

          Réflexion sur l’influx nerveux.

          Tout ce que nous voyons, tout ce que nous entendons, enfin tout que nous ressentons est enregistré et interprété par des zones spécialisées de notre cerveau qui analyse et envoi les messages appropriés à notre système fonctionnel (musculature) ou psychique (conscience).
          Toute perception met en œuvre un récepteur (l’œil par exemple) et un émetteur réunis par un canal (le nerf optique) qui transmet l’information au cerveau. C’est le cerveau et son prolongement dans le rachis (moelle de la colonne vertébrale) qui forment le Système Nerveux Central. Les fibres nerveuses provenant de la moelle épinière et celles qui irradient dans le tronc et les membres forment le Système Nerveux Périphérique.
          Afin de comprendre le processus de la transmission de l’influx nerveux, choisissons un exemple très simple, mais douloureux :
          A la mer, lors d’une baignade, je pose mon pied sur un oursin, les fibres nerveuses de mon Système Nerveux Périphérique (au niveau de mon pied) sont existées et transmettent un influx nerveux à mon cerveau par l’intermédiaire des fibres nerveuses des axones et des neuromédiateurs libérés dans les fente synaptiques (synapses) ; c’est la « conduction ». Dans un premier temps, un arc réflexe, au niveau de la moelle épinière, commande inconsciemment à la musculature de la jambe, un mouvement de retrait de mon pied de l’oursin, et ainsi me permet de limiter les dégâts. Dans un deuxième temps, très bref, la transmission de l’influx arrive à mon cerveau qui enregistre la sensation de douleur (qu’est-ce qui l’occasionne ?) et me fait prendre conscience de la situation afin de mieux la maîtriser (enlever l’oursin et les épines de mon pied, sans toutefois me piquer les doigts).

          Les fonctions cérébrales humaines. La perception ; une fonction vitale dépendante de nos sens et de notre personnalité.

          L’organisation de la perception dépend à la fois de notre expérience et de nos tendances à envisager les événements que nous observons.
          La vue et l’odeur d’aliment s’accompagneront de composantes affectives différentes ; une attraction si l’on est à jeun ou un dégoût si l’on est rassasié.
          Dans un grand nombre de cas, c’est l’histoire individuelle vécue qui conditionne la composante affective de chaque perception. Tout ce que nous percevons est soumis à nos propres expériences ; nous avons tendance à percevoir ce que nous avons l’habitude de percevoir.
          Plus la confirmation d’une croyance aura de valeur pour le développement d’une activité orientée vers un but, plus grande sera sa force : je vois ce que j’ai envie ou besoin de voir.

          Les opérations logiques de la pensée humaine.

          La pensée humaine est une suite d’opérations logiques effectuées sur des symboles abstraits.
          Penser, c’est manipuler des « représentations », lire, rédiger une lettre, choisir une destination, participer à une conversation, etc., tout cela ne serait rien d’autre que la manipulation d’une foule de symboles, d’images mentales, en fait de « représentations » sur lesquelles on effectue un ensemble d’opérations logiques. Ce processus s’effectue en trois temps :
•      Le filtrage de l’information. Dans le brouhaha d’une foule en réunion, je peux sélectionner la voix de mon interlocuteur parmi les autres ; mon attention sélective transforme l’ensemble des conversations en un bruit de fond sans signification. Cette sélection de l’information limite ma perception de l’environnement, mais elle est une condition indispensable pour penser efficacement.
•      La mise en forme. Elle consiste à décoder les informations recueillies, c'est-à-dire à les transformer en « représentations » mentales. Une représentation peut être une image mentale (un cube, un animal, etc.), un symbole abstrait (x, y, pi, etc.), un concept (un ordinateur, un livre, etc.), soit un ensemble structuré d’objets mentaux qui correspondent à une « connaissance » sur le monde. Par exemple le mot « oiseau » est une représentation qui renvoie à un certain nombre d’informations associées : un oiseau est un animal qui a des ailes et un bec, qui vole, cette connaissance peut être vraie ou fausse (une autruche est un oiseau qui ne vole pas). Certains psychologues préfèrent parler de croyance plutôt que de connaissance.
•      Le cerveau une machine à traiter l’information. Toute la pensée, même la plus ordinaire, peut être traduite sous forme d’opération de déduction. Ainsi pour produire une idée simple du type : « Si je prends le TGV qui roule à 300 kilomètres par heure, sans arrêt, pour me rendre de Marseille à Paris, j’irai plus vite que si je prends ma voiture qui roule à 130 kilomètres par heure avec des arrêts tous les 2 heures aux aires de repos des autoroutes » (opération de déduction), notre esprit mobilise une suite d’opérations logiques du type « si A (plus rapide), alors B (moins rapide) ». Cette idée simple est traduisible en termes de logique de propositions.

          Réflexion sur la mémoire, un aspect de la personnalité.

          C’est notre mémoire qui constitue la structure de notre personnalité et qui nous permet de retenir des informations pendant quelques secondes ou des années. Tout ce que nous savons du monde qui nous entoure ou de notre propre vie est inscrit dans notre mémoire.
          Nous avons deux types principaux de mémoire ; la mémoire à court terme et la mémoire à long terme :
          La mémoire à court terme ou mémoire de travail a une taille extrêmement limité : elle ne retient que 6 ou 7 éléments dans un temps très bref, par exemple un numéro de téléphone lu dans le bottin et aussitôt oublié après l’avoir composé. Cette capacité de mémoire est appelée « empan mnésique ». La mémoire à court terme se vide rapidement et automatiquement, après utilisation, afin d’avoir la possibilité de passer à une autre activité. Elle sert aussi à un autre usage, elle est un lieu de passage incontournable vers la mémoire à long terme, dans ce cas, elle subit un traitement ou « codage », qui la rend assimilable par la mémoire à long terme, laquelle mémorise le sens de l’information et non le mot à mot.
          Une personne qui s’intéresse à ce qu’elle entend retrouvera plus facilement les informations antérieures selon l’importance qu’elle leur aura accordée.
          La mémoire à long terme a une caractéristique essentielle, c’est d’être disponible en permanence. Cette disponibilité exige la mise en œuvre de trois étapes successives :
•      Une phase d’enregistrement (dite l’encodage) et de stockage qui transforme les information perceptives en traces durables ; cette transformation passe par une boucle de l’entendu et du répété, par une motivation et une recherche du sens du contenu de l’information permettant ainsi un encodage conscient, adapté aux possibilités psychiques et culturelles de la personne.
•      Une phase d’organisation de cette information. Certains souvenirs très stables sont des idées ou des connaissances générales que l’on regroupe sous le nom de mémoire sémantique. Savoir que la Lune est le satellite naturel de la Terre fait parti de cette mémoire sémantique. A l’inverse, d’autres types de souvenirs, liés à notre expérience personnelle, sont beaucoup plus sensibles aux variations contextuelles. Ce système de stockage est appelé mémoire épisodique, par exemple « je suis allé à la mer pendant le week-end ».
•      Une phase de réactivation, de récupération dans la mémoire de ces traces. Les connaissances que nous sommes susceptibles de faire surgir de notre mémoire n’ont jamais été apprises telles quelles : nous les reconstituons, nous les déduisons d’autres connaissances déjà acquises. La qualité principale de notre mémoire n’est certainement pas sa fidélité ; c’est sans doute son aptitude à produire de nouvelles connaissances. Utiliser des connaissances en mémoire pour en produire d’autres est un des traitements les plus profonds pour consolider nos savoirs. De toutes façons nous n’accédons jamais directement à la mémoire à long terme ; qu’il s’agisse d’y ranger de nouvelles informations, d’y retrouver des informations anciennes, ou que des souvenirs en surgissent brusquement, tout transite par la mémoire de travail.
•      Traiter l’information pour la retenir, c’est la reformuler pour se l’approprier. Reformuler dans son propre langage l’information reçue, c’est déjà traiter l’information pour la retenir. Ce n’est, sans doute, pas le propos entendu lui-même qui se retrouve dans la mémoire à long terme, mais l’activité mentale que suscite ce propos.

          Réflexion ; la libération de l’esprit par les automatismes.

          Le travail intellectuel demande une énergie souvent épuisante pour une personne peu entraînée à la recherche des causes naturelles que nous percevons et pour l’apprentissage d’une formation d’un adulte sorti depuis longtemps du milieu scolaire. Utiliser son cerveau est fatiguant, principalement si l’on n’est pas entraîné et surtout pas motivé. Il en est du travail intellectuel comme de l’activité motrice : l’automatisation des gestes diminue considérablement la fatigue et libère l’esprit pour les activités de niveau supérieur. Prenons l’exemple de la conduite automobile. D’où vient que l’apprenti conducteur de l’auto-école se fatigue bien plus que l’ancien conducteur ? Qu’il lui est plus difficile d’écouter son moniteur ou de lui parler ? C’est précisément que sa mémoire de travail participe consciemment à toutes les manœuvres que nécessite la conduite automobile, tourner la clé de contact, démarrer le moteur, embrayer ; appuyer sur la pédale gauche, démarrer la voiture ; passer la première vitesse et desserrer le frein à main, regarder dans le rétroviseur, mettre le clignotant… Comment est-il possible de bavarder en accomplissant toutes ces actions presque simultanément ? Et pourtant ! Il suffit que l’enchaînement de toutes ces opérations soient automatisées, qu’elles se fassent sans y penser pour que la tête reste libre de continuer la discussion entamée avec son passager.
          L’automatisation s’acquiert par la répétition des gestes ou des mots, elle permet de nous adapter à notre environnement immédiat et à notre milieu social mais elle ne doit pas nous faire oublier que l’être humain possède un néocortex fortement développé capable de création, et doté d’une pensée abstraite hautement évoluée qui lui a permis d’écrire des symphonies et de mesurer des galaxies.

          Voir les manifestations de la pensée.

          Pour progresser, les sciences se sont toujours efforcées de voir l’invisible. Les scientifiques ont inventé des microscopes optiques et électroniques de plus en plus perfectionnés ainsi que des télescopes toujours plus puissants. En neuroscience, le rêve du chercheur est de voir le cerveau fonctionner, de détecter les pensées. Ce rêve est peut être en train de devenir une réalité avec l’imagerie cérébrale dont la principale technologie concerne :
          L’imagerie par résonance magnétique (IRM).
          L’aimantation est le phénomène qui intervient dans le fonctionnement des appareils à IRM. L’hydrogène (H) est un constituant principal de presque toutes les molécules du vivant. Les molécules d’eau (H2O), qui contiennent 2 atomes d’hydrogène et 1 atome d’oxygène, représentent plus de 80% du poids du cerveau. Nous savons que le noyau d’un atome d’hydrogène n’est formé que d’un unique proton qui tourne, très rapidement sur lui-même (ce mouvement propre aux particules est appelé « spin »). Chaque spin engendre un mini champ magnétique. Les spins des protons qui constituent la matière vivante sont orientés chacun dans des positions différentes ce qui a pour conséquence d’annuler le magnétisme de l’ensemble.
          Lorsqu’on place une personne dans un appareil à IRM traversé par un fort champ magnétique (noté Bo), celui-ci étant orienté des pieds vers la tête de la personne, le spin des noyaux d’hydrogène de son corps s’orientent tous selon la direction de ce champ. Ainsi, tout se passe comme si, en plongeant une personne dans un champ magnétique puissant on l’avait aimanté.
          L’objectif de l’IRM est de mesurer l’aimantation en chaque point du cerveau. Pour cela il faut créer un autre champ magnétique (noté Mo), plus faible qui tourne rapidement autour de la tête de la personne provocant ainsi une oscillation des protons alignés dans le champ (Bo). Ce champ (Mo) est coupé brièvement, par intermittences, afin de permettre aux protons de retourner progressivement à leur position d’équilibre dans le champ initial (Bo). Les phénomènes magnétiques sont enregistrés par les ordinateurs de l’appareil à IRM, sachant que la densité des protons est différente dans les divers tissus qui constituent la matière cérébrale, les activités du cerveau peuvent être interprétées et visualisées sur l’ordinateur. Les images des zones actives du cerveau montrent la correspondance de la pensée et de l’action accomplie par la personne sous IRM (bouger un index, par exemple, correspond à une activation de telle zone du cerveau).
          Cette technique d’IRM, a tout de même ses limites, elle peut définir les zones du cerveau qui sont activées pour telle ou telle action, mais pas le contenu de telle ou telle pensée.